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Récit - Et vous que faisiez-vous le dimanche à 15 ans ?

Dernière mise à jour : 1 avr. 2020

Ah, le Dimanche, les Dimanches …. A 15 ans c'était difficile, rien que la perspective d'arriver au Dimanche. Jour du grand Rituel. Et pas moyen d'y échapper. Tout était connu d'avance.

Tout d'abord la messe, l'église n'était pas loin et ma mère, qui était dame catéchiste nous y emmenait mon frère et moi. Il fallait faire bonne figure, la gentille fille, pas de vague. Injonction compliquée pour moi au moment où la bousculade et la révolte montaient à l'intérieur. A 15 ans le mouvement était déjà lancé !

Tout de suite après le second rituel : le déjeuner du dimanche. Invariablement du poulet rôti, je sens encore l'odeur de la peau grillée dans mes narines. Je ne mange plus de viande depuis longtemps. Le plus souvent nous quatre à table. Plus rarement on partait déjeuner en famille. Un grand repas sans rien d'excessif dans l'ambiance : discussions des adultes, jeux des enfants, qu'est ce que tu fais quand tu as 15 ans et pas forcément les mêmes idées que ceux qui t'entourent ? Tu essayes de disputer la partie ou le plus souvent tu observes de loin en te disant : attention à ce que tu deviendras plus tard ! Et tu t'inventes tes règles.

Le troisième rituel était celui de l'après midi, les dimanches où nous étions nous quatre. Alors c'était la balade du dimanche. Elle était obligatoire, mon père en avait choisi la destination, ll y en avait quatre ou cinq habituelles. Nous prenions toujours la voiture pour y aller. Je me souviens surtout de la destination : l'écluse. C 'était à Andrésy, banlieue parisienne , sur la Seine. Nous descendions de la voiture et regardions l 'écluse. Et aussi les péniches qui passaient si lentement. Chacun pour soi. On faisait quelques pas. J'aurai aimé qu'il y ait des discussions, que cet espace extérieur libère un peu d'élan et de chaleur, qu'on communique. Mais cela ne se passait pas. Peut être juste prendre l'air était le projet de mon père ? Je ne sais pas ce que ma mère ou mon frère en pensaient. On rentrait à la maison. Quatrième temps , dans ma chambre. Attention : tu as fais tes devoirs ? Le lundi arrivait avec quelques serrements de gorge.......je fermais ma porte et m'appliquais à mes devoirs. Opération fastidieuse..... Mais je pouvais tranquillement me livrer à quelques divagations et rêveries. Il y avait déjà quelques amoureux et je pensais délicieusement à eux.Enfin le dernier rituel était là : le repas du soir. Harengs marinés et pommes de terre. Un moment que j'aimais bien. Peut être aussi parce que cela signifiait la fin du dimanche.


Bref le dimanche était ma bête noire. L'espace exact du ratage. Et oui nous avions du temps, nous étions ensemble, tout aurait pu être merveilleux à partager ! Et en fait une peur sourde courait entre tous ces moments obligés, exécutés sans âme et sans désir. L'obligation à la place du plaisir et de la liberté. Pourquoi n'arrivions nous pas à nous ouvrir ? Pourquoi fallait il se contenter d'un tout petit bout de partage alors que nous aurions pu obtenir le grand amour ? Empreintes en forme de questions qui m'ont poursuivie, bousculée, guidée pour le mieux.


Merci donc à ces dimanches de mon enfance qui m'ont permis de chercher d'autres espaces, d'autres respirations : lire, rêver, imaginer, construire avec les amis, réfléchir à ce qu'on vit........évidemment s'engager peu à peu vers le théâtre, sauvée ! Et pouvoir aujourd'hui partager tout ça.


Vive l'imagination, la liberté, l'amour partagé !


Véronique. 61 ans

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